« Le clitoris est un organe néfaste ......disent-ils »… Quand la tradition tue encore les filles

« Le clitoris est un organe néfaste ......disent-ils »… Quand la tradition tue encore les filles

Cette phrase, souvent entendue dans certaines communautés d’Afrique de l’Ouest, continue d’alimenter l’une des violences les plus anciennes et les plus destructrices envers les femmes : l’excision.
Sous couvert de coutume, des milliers de filles guinéennes subissent encore cette pratique chaque année, souvent avant même d’avoir compris ce qu’on leur fait.

Comprendre les causes et les conséquences de l’excision pour mieux agir

Encore aujourd’hui, plus de 230 millions de filles et de femmes dans le monde vivent avec les séquelles de l’excision, selon l’UNICEF (2024).
Cette pratique, profondément ancrée dans certaines traditions, continue d’être perçue comme une condition de pureté, de respect ou de mariage.
Mais la réalité est tout autre : l’excision est une atteinte grave aux droits humains, à la santé et à la dignité des femmes.

 Qu’est-ce que l’excision ?

Les mutilations génitales féminines (MGF), communément appelées excision, désignent toute ablation partielle ou totale des organes génitaux externes féminins pour des raisons non médicales.
Elles constituent une violation du droit à l’intégrité physique et morale, reconnue comme telle par la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) et la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant.

On distingue quatre types de MGF, dont les plus répandus — les types I et II — consistent à couper le clitoris et les petites lèvres.
Ces pratiques se déroulent souvent dans des conditions précaires, sans hygiène ni anesthésie, exposant les victimes à des risques immédiats d’hémorragie, d’infection ou de décès.

Une réalité alarmante en Afrique de l’Ouest

L’Afrique subsaharienne concentre la majorité des cas de mutilations génitales féminines. Les pays où la prévalence est la plus élevée incluent notamment la Guinée (95 %), Djibouti (94 %), le Mali (89 %) et l’Égypte (87 %). Ces chiffres témoignent d’une réalité alarmante : malgré des décennies de lutte, les mutilations persistent, souvent au nom de traditions et de croyances profondément enracinées.

En Guinée, près de neuf femmes sur dix ont subi une forme de mutilation génitale avant l’âge de 15 ans. Pourtant, la pratique est interdite par la loi depuis 1965 et réaffirmée par le Code pénal guinéen. Mais les normes sociales, la pression communautaire et la peur du rejet social continuent d’alimenter sa perpétuation, parfois dans la clandestinité la plus totale.

Ce silence imposé autour de l’excision a encore des conséquences tragiques. En août 2025, une fillette de 5 ans, envoyée en cachette par une parente pour être excisée dans le quartier de Koloma (Conakry), a perdu la vie des suites d’une hémorragie sévère. Ce drame, qui a profondément choqué l’opinion publique, illustre le danger réel auquel sont exposées des milliers de filles chaque année.

Des conséquences dramatiques pour la santé des filles et des femmes

L’excision n’apporte aucun bénéfice médical. Elle engendre, au contraire, des complications physiques et psychologiques à court et long terme :

  • Douleurs et hémorragies au moment de l’acte ;
  • Infections urinaires et vaginales chroniques ;
  • Complications obstétricales (déchirures, fistules, mortalité maternelle et néonatale) ;
  • Infertilité et douleurs sexuelles persistantes ;
  • Traumatismes psychologiques, anxiété, dépression, perte d’estime de soi.

L’Organisation mondiale de la santé estime que les femmes excisées sont 30 % plus susceptibles de subir des complications graves à l’accouchement.
La douleur, souvent intériorisée et tue, devient un héritage silencieux transmis de génération en génération.

 Une tradition qui ne protège pas, mais qui blesse

L’excision trouve ses racines dans la volonté de contrôler la sexualité féminine.
Elle repose sur des croyances erronées selon lesquelles le clitoris serait un organe impur ou dangereux.
Or, cette idée n’a aucun fondement religieux ni scientifique.

Dans la majorité des cas, les familles pratiquent l’excision par peur du rejet social : une fille non excisée est considérée comme « incomplète » ou « impure ».
Ce poids social explique la difficulté du changement, malgré les lois et les campagnes de sensibilisation.

 Vers une Afrique sans excision

Les signes d’espoir se multiplient.
Dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, des milliers de villages ont publiquement déclaré l’abandon de la pratique, souvent à la suite de programmes communautaires qui ont permis un dialogue ouvert entre anciens, chefs religieux, femmes et jeunes.
Ces engagements collectifs montrent que le changement est possible lorsque la communauté toute entière choisit de protéger ses filles plutôt que de céder à la peur du jugement.

Lutter contre l’excision, c’est :

  • protéger la santé et la vie des filles,
  • favoriser leur scolarisation et leur autonomie,
  • promouvoir une société fondée sur la dignité, l’intégrité et l’égalité.

Chez Regard SUR ELLE, nous croyons qu’une Afrique sans excision est possible.
Cela passe par l’éducation, le dialogue communautaire et la valorisation des traditions qui unissent sans blesser.
Préserver l’intégrité d’une fille, c’est investir dans un avenir où la femme n’est plus mutilée, mais respectée, instruite et libre.